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Philippe Portier (Groupe Novandi) : l’entrepreneur multimodal

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Incontournable dans la logistique en région liégeoise, Philippe Portier ne cesse de développer son groupe en utilisant le rail, l’eau et la route. Ses horizons sont larges, ici et ailleurs. Il réceptionne par exemple les fameux trains venus de Chine. Rencontre entre coils et containers…

Copyright Patrick Moriamé

La Meuse coule au pied de son bureau. Un portique déplace tous les jours des centaines de coils sous ses yeux. La plateforme multimodale de Renory, à un jet du centre de Liège situé en aval, est une fourmilière. Entre le rail, l’eau et la route, les transbordements sont continus, avec une majorité de conteneurs et de vrac.
Nous sommes dans le quartier général historique de Novandi. Ce groupe multimodal et logistique est incontournable en région liégeoise, avec ses plateformes : Renory, Liège Logistics à proximité de Liege Airport, Trilogiport (en partenariat avec Dubai Port World), sans compter Charleroi.
Derrière ce développement impressionnant, une équipe emmenée par un homme : Philippe Portier. Il est amusant de constater qu’après ses études en automation, l’Awirien a vécu 9 mois à Rotterdam, le plus grand port d’Europe. « J’ai vécu dans cette ville pour apprendre le néerlandais en travaillant dans la division pneumatique du groupe international Atlas Copco, avant de faire mon service militaire comme officier de réserve dans l’infrastructure blindée. L’un et l’autre ont été des expériences enrichissantes où j’ai beaucoup appris. »

L’armée sera par exemple pour lui une excellente école de vie, là où on apprend à encourager, encadrer, diriger et aussi houspiller des hommes. Philippe Portier est très attaché à la notion d’équipe.  Son destin a été tracé très tôt. « Je représente la troisième génération d’entrepreneurs. Dès le début de mes humanités, mon papa (Gustave) me parlait déjà de mon avenir professionnel dans le groupe familial. A la maison, j’entendais parler des affaires et je travaillais dans l’entreprise pendant mes vacances. »
Philippe Portier débute sa carrière chez Gravibeton, une des entreprises du Groupe Cop&Portier (qui sera scindé entre le Groupe Portier Industries et Cop). Il quitte ensuite le pôle construction du Groupe Portier Industries pour rejoindre le pôle logistique, à Renory. Au fil des années, déjà fort d’un solide bagage technique, il apprend les finances, les RH, le commercial,…
Quand le groupe familial est réorganisé entre les 7 enfants de Gustave Portier en 2012 et 2016, Philippe Portier reprend seul avec son épouse Hélène Braham la partie logistique.


Aujourd’hui, Novandi emploie 140 personnes et offre une large gamme de métiers : manutention, stockage, gestion des stocks, entretien technique, conditionnement, dédouanement, empotage, calage, transport, expédition,… « Nous sommes tout à fait indépendants et donc neutres. Nous veillons à bien nous entendre avec tous les acteurs du marché. Nous ne sommes par exemple pas concurrents des sociétés de transport ; nous travaillons avec elles. »


Le groupe a été pionnier il y a plus de 15 ans, en lançant notamment une navette fluviale entre Liège, Anvers et Rotterdam. Aujourd’hui, ce sont 5 bateaux et 2 barges qui assurent des allers-retours entre la Cité ardente et le port anversois. « Ce trafic représente 110.000 camions par an, ou l’équivalent d’une file de 1988 kilomètres si ces camions étaient pare-chocs contre pare-chocs ! »  

Mais ce sont surtout les trains venus de Chine qui font l’actualité depuis 2018, grâce à l’action de l’Awex. « Nous accueillons chaque semaine 7 trains de 42 wagons qui parcourent entre 9 et 11.000 km en 14 à 18 jours. Ces convois viennent du centre de la Chine. Quand ces marchandises venaient en bateau, elles devaient effectuer un millier de kilomètres jusqu’à Shanghai, puis naviguer 5 à 6 semaines. Le bateau est peu cher et lent, l’avion est cher et rapide, le train est donc un bon compromis. »
A Bierset et à Hermalle-sous-Argenteau, Novandi réceptionne les convois chinois, décharge et transporte (avec d’autres opérateurs) tous types de marchandises parmi lesquelles une majorité de textiles et de petits électroniques. L’équivalent de 4 trains sur les 7 hebdomadaires repartent ou sont repositionnés sur Anvers. Si la balance est actuellement déficitaire, ce trafic favorise néanmoins l’exportation vers la Chine.

Comment ce spécialiste perçoit-il l’avenir de la logistique ? « Il existe beaucoup d’incertitudes, comme la géopolitique, l’évolution des droits de douanes, les spécificités des pays, etc. Une société allemande nous a par exemple demandé d’exporter son lait en poudre vers la Chine. Nous n’avons pas pu assurer ce transport par le train car la Russie interdit le transit de ce type de produit pour lequel il existe des entreprises russes concurrentes. » Mais l’Awirien a aussi des certitudes : « La gestion de l’information et des bases de données est essentielle ! ».

Et quid des effets de la pandémie ? « Il existe un mouvement – auquel je souscris – de privilégier les productions locales. Cette tendance m’amène à nous inscrire dans une logistique de type mobilité urbaine proche des consommateurs. Ici à Renory, nous avons par exemple transformé une ex-usine en hall avec plateforme d’éclatement pour servir le centre de Liège avec de petits véhicules. »

C’est un projet parmi d’autres car Philippe Portier a une véritable vision pour son entreprise.

DU TAC AU TAC

Coup de génie
Forcer la collaboration avec DPWorld (Dubai Port World) qui avait obtenu la concession de la plateforme multimodale du Trilogiport. J’avais obtenu un rendez-vous avec Rob Harrisson, le patron de DP World à Anvers. En arrivant, je lui ai dit : « votre bureau est confortable, la température est agréable : je ne quitterai pas avant que nous ne trouvions un accord. » Quinze minutes plus tard, on avait une décision de principe. Depuis lors, nous avons une relation très respectueuse. En fait, nous avons payé la paix pour éviter de financer la guerre.
Coup de cœur
L’achat de deux bateaux (110 mètres de long, 11,4 mètres de large) pour nos transports principalement entre Liège et Anvers. J’ai pris beaucoup de plaisir à leur aménagement intérieur, à comprendre la mécanique et les règles de navigation,… J’en ai d’ailleurs profité pour passer mon permis.
Coup de gueule
Je ne supporte pas le mensonge. Je deviens parfois colérique si je perçois qu’on essaie de me tromper.


Mes plus grands défauts
Je suis impatient, parfois intempestif. Mes enfants me disent souvent que je fais peur ; j’y travaille donc…

Mes plus grandes qualités
Je suis curieux de tout, surtout par rapport aux évolutions technologiques, et j’ai la conviction que je n’ai pas toutes les compétences. Je pense aussi être un bon meneur d’hommes. J’accorde de l’importance à l’humour ; une bonne réunion par exemple, c’est une réunion à laquelle on prend plaisir à participer et qui se clôture par une décision.

Mon adage 
Le développement intellectuel passe par l’apprentissage manuel.




Novandi (siège) : Rue de Renory 478 à 4031 Liège (Angleur) -Tél : 04/343.58.28 – philippe.portier@novandi.bewww.renory.be


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