Sensation à la plus grande foire aux fromages de France, début juin, à Sainte-Maure de Touraine, où la Wallonie était la région invitée d’honneur. La fromagerie artisanale du Troufleur (*), à Thirimont dans la commune de Waimes, a raflé la médaille d’argent avec son fromage à pâte molle et de couleur ocre foncé, le Coeur de Bellevaux.
Ce n’est pas le premier prix remporté par le Troufleur. En 2019, le Flocon des Fagnes avait obtenu la médaille d’or du meilleur fromage « à croûte fleurie » de Wallonie.
« J’ai participé au concours pour répondre à l’invitation des organisateurs, pas pour recevoir une médaille » explique Françoise Ledur. « Mais ça fait plaisir parce que c’est une reconnaissance de qualité face aux meilleurs fromages français. C’est d’autant plus valorisant qu’il s’agissait d’un concours à l’aveugle sans étiquette. Pas question de favoriser les produits de la région invitée ! Je suis contente aussi que mon collègue de la fromagerie Le Valet à Amblève ait été primé également. »
La fromagerie du Troufleur occupe quatre personnes, quatre femmes ! Deux, dont la propriétaire, travaillent à temps plein, la troisième, 12h par semaine et une étudiante vient « donner un coup de main » le week-end. Le travail ne manque pas : quatre heures de moulage chaque matin juste après la traite, l’affinage à l’eau ou à la bière et ensuite la période de maturation de six semaines à six mois pendant laquelle il faut régulièrement surveiller, « soigner » et retourner les fromages.
Lait, eau, bière et l’air pur des Fagnes
La production annuelle tourne autour de 13.500 kg, ce qui représente au moins 135.000 litres de lait ! Celui-ci est fourni par les 60 vaches montbéliardes du mari de Françoise et de son beau-frère. Un bel exemple d’artisanat local et familial !
La montbéliard est une race originaire du Jura dont le lait sert à fabriquer le célèbre comté. « Ces vaches bénéficient d’un environnement idéal ici dans les Hautes-Fagnes, à une altitude de 500 à 700m. Les pâturages sont riches d’une flore rare, du fenouil et du trèfle blanc notamment, qui donne au lait une saveur particulière. C’est le cas aussi pour l’eau pure des nombreuses sources, des ruisseaux et des petites rivières de la région. »
L’eau est un élément indispensable à la fabrication du fromage… et de la bière qui sert à l’affinage de deux tiers des fromages du Troufleur. Pour le Coeur de Bellevaux, Françoise Ledur utilise une bière brune locale produite dans une microbrasserie du village voisin de Bellevaux dans l’entité de Malmédy.
En tout, c’est près d’une vingtaine de fromages différents, mais toujours au lait cru entier non pasteurisé, que le Troufleur propose aux gastronomes. Ce sont majoritairement des pâtes molles. Impossible de les citer tous mais plusieurs portent un nom évocateur de leur région d’origine : Ovifat, Rheinhardstein, Petit Fagnard ou encore Fenouil des Hautes-Fagnes.
50 points de vente
Les fromages du Troufleur sont appréciés dans l’ensemble du pays. « J’ai des clients à Ostende, à Anvers, à Audenarde, à Mons et dans toute la Wallonie. Certains viennent les chercher eux-mêmes. On en trouve aussi dans certaines grandes surfaces par l’intermédiaire de grossistes. Et puis, il y a surtout les crèmeries-fromageries. Beaucoup sont approvisionnées par les grossistes mais j’assure moi-même certaines livraisons avec ma camionnette et mes frigo-box. Nos fromages sont aussi à la carte de plusieurs restaurants, par exemple le Domaine des Hautes-Fagnes, le Petit Mont Rigi ou le Bütgenbacher Hof, pour ne parler que de ceux de notre région. »
En tout, plus de 50 points de vente dont un récent à Strasbourg, présentent dans leur étal les fromages du Troufleur. Depuis sa création en 1986, Troufleur rime avec précurseur en défendant avec succès l’artisanat local et familial. Voilà qui doit plaire aux récolteurs de tourbe du temps passé…
(*) Les troufleurs étaient les récolteurs de la tourbe des Fagnes (troufe en wallon) qui a servi de combustible à partir du 17ème siècle
(Photo Fromagerie du Troufleur)
